Fontcouverte
 

Consigne du sel pour l'année 1729

    

La source provient des archives de la cure de Fontcouverte déposée à l’évêché de Saint-Jean-de-Maurienne.

La consigne du sel pour l’année 1729 se situe au milieu d’une série de dénombrements annuels (à quelques lacunes près) s’étendant de 1718 à 1738. Elle n'a pas été étudiée de façon très approfondie, le but initial étant de déterminer le nombre de majeurs de 5 à 9 ans révolus susceptibles de ne pas être consignés de façon à établir uns statistique de ce phénomène entre 1716 et 1738. L'étude a cependant tiré profit d'informations particulières concernant la population et le bétail.

La consigne ne précise pas l’époque de réalisation du dénombrement dans la paroisse mais le substitut du secrétaire Jean Gilbert en charge du document l’a signé du 12 janvier 1729. On peut donc penser que ce dénombrement a été réalisé en décembre 1728, époque conforme à la réglementation en la matière. Pour nos calculs des âges nous avons retenu la date du 15 décembre 1728.

Aucun terme particulier n’étant utilisé dans la consigne pour les unités de regroupement des personnes, nous utilisons celui général de « feu » sans ambiguïté avec les termes employés dans le traitement de la consigne.

Le document a une présentation différente des consignes du sel précedentes. Il ne s'agit plus d'un tableau dont les colonnes donnent les divers types de personnes ou de bétail mais d'une liste des divers feux pour lesquels sont précisés, en un texte continu, les personnes suivies du bétail.

Pour chaque « feu » le document original donne  :

Le texte final de la consigne précise que du sel restant de l'année précédente a été réparti mais on ne sait où dans le texte.

Doutes et difficultés

Le document apparaît de qualité correcte en tout cas facile à lire. On doit surtout noter la mention du village de résidence des « feux » bien que ceux-là soient souvent arbitrairement regroupés. Mais la précision des liens de parenté liant les membre de chaque « feu » est rarement donnée de façon claire ce qui rend parfois difficile l'identification des personnes. Le sexe des individus ne peut être déterminé que par les prénoms. Deux enfants sans prénom restent de sexe indéterminé. Il apparaît, en particulier, un nombre important (40 environ) d'enfants de 5 à 9 ans révolus qui ne sont pas consignés.

Quant au bétail, il n'est réparti qu'entre quatre catégories (vaches, vaches à l'hiverne, génisses, brebis parfois associées à des chèvres) ce qui ne permet pas de savoir si certaines bêtes ne sont pas consignées ou si elles sont regroupées avec d'autres (bœufs et chèvres en particulier).

Le contrôle des calculs des montants de sel attribués à chaque « feu » (avec une imposition estimée de 8 livres par majeur avec une forte réduction pour les pauvres, de 4 livres par vache (contre 5 normalement), de 3 livres pour celles à l'hiverne, de 4 livres par génisse et d'une livre par brebis ou chèvre) montrent généralement une certaine exactitude ; des écarts faibles correspondent sans doute à un mauvais report du nombre des personnes ou des têtes de bétail ; 11 écarts supérieurs à 10 livres (pouvant atteindre 30 livres) sont de signe autant négatif que positif et d'explication non trouvée. Ce dernier point ne correspond pas au sel réparti du reliquat de l'année précédente.

Cinq des totaux par page sont erronnés mais le total général est exact. Les erreurs constatées ne seraient alors que des anomalies de recopie.

Résultats globaux

Du fait du mode de présentation, le secrétaire ne donne aucune statistique globale en dehors du total de sel imputé à la paroisse.

De notre côté nous trouvons  :

Nombre de « feux » : 268

Population

Sont comptabilisés comme présents et constituant la population de fait tous les Fontcouvertins résidant au moins six mois dans la paroisse. C'est le cas pour la totalité des personnes consignées.

L’estimation des mineurs de 5 ans a été réalisée à partir de la structuration de la population arrêtée au 15 décembre 1728.

Une estimation des enfants agés de 5 à 9 ans révolus très probablement présents à Fontcouverte fin 1728 montre que 37 d'entre eux n'apparaissent pas dans la consigne. Ils sont à ajouter au volume de la population de fait qui peut être déduite de la consigne.

Majeurs Enfants 5-9 ans
non consignés
Total des majeurs Mineurs
(estimés)
Total population
Hommes 474 19 493 76 569
Femmes 527 18 545 53 598
Total 1001 37 1038 129 1167

Nombre moyen de personnes par feu : 4,4

Bétail

Vaches Vaches à l'hiverne Génisses Brebis et chèvres
423 75 270 1530

Identification dans l’état civil des personnes consignées

Du fait du mode de présentation de la consigne et en l’absence de toute mention précise concernant les liens de parenté des personnes constituant les « feux », l’identification à partir de l'état civil est particulièrement difficile, voire incertaine. Nous disposons de peu de dénombrements plus précis et proches dans le temps dont la comparaison pourrait améliorer la situation.

Parmi les 1 001 personnes consignées 888 ont été identifiées avec une certaine garantie ce qui conduit à un taux d'identification de 89 %. 25 personnes sont des personnels de service présentés souvent sans nom ou avec leur seul prénom dans cas les moins défavorables, autant de personnes non identifiable a priori. 976 personnes restent donc susceptibles d'être reconnues. Le taux d’identification des personnes identifiables s'élève alors à de 91 %, valeur relativement faible confirmant la difficulté d’emploi de la consigne et due également au temps restreint que nous lui avons consacré.

Estimation du nombre des mineurs de 5 ans

Une analyse précise du devenir des enfants nés après le 15 décembre 1728 a été réalisée. On constate alors que la quasi totalité de ces derniers restent à Fontcouverte au moins dans leurs 5 premières années.

La méthode d’estimation du nombre de mineurs censés vivre à Fontcouverte le 15 décembre 1728 conduit au nombre de 129 enfants : 76 garçons et 53 filles.

Estimation des enfants non consignés agés de 5 à 9 ans

La comparaison des enfants qui seraient agés de 5 à 9 ans révolus donnés par la structuration de la population à ceux mentionnés dans la consigne et qui auraient ces âges (calculés par la structuration de la population) fait apparaître un manque de 37 enfants : 19 garçons et 18 filles. L'erreur possible sur l'estimation pourrait être une sousestimation de 3 à 4 enfants. Ce nombre de 37 est très voisin de celui rencontré dans la même analyse des consignes voisines.

Proportion des mineurs de 5 ans dans la population totale

La proportion qui est donnée par les 129 mineurs estimés s’élève à 11,0 %, valeur faible en comparaison de celles observées dans les autres consignes de l’époque et plus généralement en Maurienne. Elle correspond à une période (1724 à 1740) où le nombre des naissances est réduit, particulièrement celui des filles.

Domesticité

Parmi les 25 personnes de service consignées :

Même quand elles sont connues par leur nom et prenom, ces personnes ne sont pas facilement identifiables. Les prénoms et les noms quand ils sont donnés, sembleraient signifier que ces personnes de service sont originaires de Fontcouverte (seuls deux domestiques du curé seraient issus de sa paroisse d'origine).

Répartition des maisons, des « familles » et de la population dans les villages

La consigne du sel pour 1729 a la particularité exceptionnelle pour l'époque de préciser le lieu d'implantation des « feux ». Ce fait permet de remonter 30 ans avant la consigne du sel de 1759 qui donne les mêmes renseignements. Cependant, le secrétaire rassemble les villages de faible population dans des regroupements particuliers éventuellement différents de ceux observés dans les dénombrements postérieurs :

Il n'est pas précisé où sont regroupés les villages du bord de l'Arvan.

Sur la carte ci-contre les cercles orange ont une surface proportionnelle à la population de chaque village.

En glissant la souris au centre de chaque cercle il apparait sur la carte le nom du village, le nombre de ses maisons, celui de ses « feux » ainsi que sa population.

Trois zones apparaissent de supérficies équivalentes.

Les alpages au dessus de la Toussuire à plus de 1 400 mètres d'altitude ne sont pas habités de façon permanente.

Le gros de la population, soit 77 %, s'étale sur le versant en pente vers l'Arvan situé au nord du Merderet sous les alpages de la Toussuire. Le hameau de la Rochette, pris au sens large avec Le Rieu et probablement Pré sous Marin, comporte à lui seul 18 % de la population de Fontcouverte. En ajoutant le Village de l'Eglise, soit 11 %, on rassemble près 29 % des âmes de la communauté. Le village de Villard Dessous avec ses 101 habitants talomme le Village de l'Eglise ; les trois villages cumulent ainsi 38 % de la communauté.

La population située au sud du Merderet retient 23 % des paroissiens. Charvin mais aussi les hameaux situés sur le versant de l'Arvan comme La Brévière et Combérard, représente 16 % des habitants de la paroisse. L'ensemble des villages de la Crouzaz, Champlong et les Roseys représentent à eux seuls 8 % des âmes de Fontcouverte.

Pyramide des âges

En l’absence de toute mention d’âge dans la consigne, la pyramide des âges ne peut être établie qu’à partir des personnes identifiées dans la structuration de la population et dont l’âge peut être calculé à partir de la date de naissance soit 89 % seulement de la population présente.

Nous avons ajouté les enfants de moins de 5 ans issus de leur estimation à partir de la structuration de la population (2 filles sont déjà consignées par erreur du secrétaire).

Pour la tranche de 5 - 10 ans un calcul plus complexe et plus hasardeux a été entrepris. Les enfants non consignés mais très probablement présents ont été ajoutés (19 garçons et 18 filles).

Les volumes de ces deux tranches sont nettement influencés par la baisse du nombre des naissances de l'époque.

Richesse et pauvreté

Suivant la définition administrative (et peut-être l’humeur du secrétaire) du qualificatif de pauvre, la consigne mentionne 24 pauvres dont 14 seraient de plus mendiants. Ces chiffres sont relativement élevés.

Compte tenu des informations relativement réduites concernant la constitution des troupeaux, l'analyse détaillée de la richesse n'a pas été réalisée.

La structure des familles

En l’absence d’indications dans la consigne concernant les liens de parenté réunissant les personnes d’un « feu » ainsi que le sous-enregistrement de nombreux enfants à répartir laborieusement dans les divers « feux », l'analyse de la structure des familles n'a pas été entreprise. D'ailleurs, cette structure, certainement très lentement évolutive, ne doit pas s'écarter de celles de la consigne du sel de 1727 et du recensement de 1734.

Volume des « feux »

Le calcul du volume des « feux », peu évolutif dans le temps, n'a pas été entrepris.

Le bétail

Les différentes bêtes

La consigne du sel de 1929 est particulièrement avare en informations concernant le bétail. Peu de catégories différentes sont mentionnées. Si sont distinguées les vaches tenues à l'hiverne de celles tenues toute l'année, les brebis sont isolées mais pourraient comprendre les moutons et des chèvres, les génisses sont comptées à part mais grouperaient peut être des bœufs. Aucun autre type de bétail n'est mentionné. Il est vrai que nous sommes en début d'hiver, les agneaux, chevreaux et veaux vont seulement commencer à naître.

Les volumes des vaches et des brebis sont relativement stables par rapport aux consignes précédentes.

L'activité pastorale est largement dominée par l'élevage des ovins et des caprins soit 67 % des têtes de bétail. Il est probable, à la vue d'autres dénombrements, que les brebis soient nettement prédominantes. Par contre, les vaches à l'hiverne sont nettement moins nombreuses que dans les consignes voisines (le rapport du nombre des vaches à l'hiverne à celui des vaches en propriété n'est que de 0,18 en 1727 contre de 0,57 et 0,24 en 1734).

La très grande majorité des « feux » (80 %) a l'habitude d'élever simultanément ovins, caprins et bovins. A peine plus de 1 % des « feux » se contente de brebis et/ou chèvres. Cependant 10 % des « feux » ne possèdent aucun bétail.

La taille des troupeaux

La taille des troupeaux s'étend de 1 à un peu plus de 45 têtes. Mais la moitié des bêtes se trouve dans des troupeaux de 5 à 20 têtes et 6 % font partie des troupeaux de moins de 5 bêtes. Malgré leur taille, les gros troupeaux de 35 bêtes ou plus ne représentent que 4 % du cheptel.

Ces importants troupeaux doivent leur nombre de têtes aux brebis pour les trois quarts. Ils représentent malgré tout une richesse certaine, leurs propriétaires étant souvent présentés comme « honorable » dans la consigne. Dans la répartition par taille des troupaux, le volume des leur bétail en fait certainement une catégorie sociale à part.

Les ovins et caprins constituent les deux tiers du bétail quelle que soit la taille du troupeau. Curieusement, cependant, cette proportion est de plus de trois quarts pour les gros troupeaux et de moitié pour les troupeaux de moins de 5 têtes contrairement à ce que l'on pourrait attendre dans la mesure où l'élevage de bovins nécessite plus de moyens que celui d'ovins ou caprins.