Fontcouverte
 

Les Fontcouvertins sont-ils riches ou pauvres ?

Répondre à cette question est pratiquement impossible à la vue des informations dont nous disposons. Il faudrait aller compulser les archives des notaires et encore ne connaîtrions-nous probablement surtout que les riches.

On peut seulement tenter une approche en ne considérant que la richesse constituée des animaux en élevage puisque les consignes du sel, voire deux recensements, nous les précisent.

Nous ne tenons donc pas compte des propriétés foncières encore que l'on puisse penser qu'il puisse exister une certaine relation entre les animaux et les terres qui les nourissent. Nous ne pouvons pas non plus apprécier les maisons mais on sait que ces dernières ont une valeur relative faible.

Enfin, l'aisance d'une famille dépend du nombre de personnes sur lesquelles les avoirs sont à répartir.

Une méthode d'estimation de la « richesse »

Nous employons donc une méthode déjà utilisée à Entremont-le-Vieux par André Palluel Guichard et à Fontcouverte-même par Grégory Girollet (un texte donne des précisions). Simplement, elle consiste à donner à chaque catégorie de bêtes portées dans un dénombrement une valeur relative arbitraire permettant de calculer une valeur globale d'un troupeau. Diviser cette valeur par le nombre de personnes qui en vivent donne un taux de richesse TRI du groupement entretenant le troupeau. Cette division conduit à une estimation des moyens économiques d'un regroupement familial souvent plus ou moins biaisée.

Enfin, des niveaux de richesse ou de pauvreté ont été définis par Grégory Girollet qui connaît bien le vieux passé de Fontcouverte ; nous le citons.

TRI Code des graphiques Niveaux de richesse
de 0,0 à 0,5 exclu [0, 0.5[ La misère totale
de 0,5 à 2,5 exclu [0.5, 2.5[ Le niveau misérable évitant tout juste de mourir de faim,
de 2,5 à 5,0 exclu [2.5, 5[ Les pauvres
de 5,0 à 7,5 exclu [5, 7.5[ Les « moyens pauvres » en situation de grande précarité
de 7,5 à 10.0 exclu [7.5, 10[ Le seuil de la misère et de la précarité est dépassé
de 10,0 à 15,0 exclu [10, 15[ L’aisance
15,0 et plus [15, ...[ La richesse

Nous profitons de la consigne du sel pour l'année 1790 où le secrétaire qualifie, avec ses termes de l'époque (pauvre, très médiocre, médiocre, aisé), la position économique de chaque groupement de personnes. On peut ainsi justifier la classification par les TRI et estimer ses limites. Le graphique suivant donne la répartition de nos niveaux de richesse dans les catégories du secrétaire.

On constate qu'un niveau de richesse se retrouve dans plusieurs catégories du secrétaire avec une répartition présentant cependant un pic : nos niveaux ont donc un sens général mais présentent un certain flou. Ce fait s'explique simplement : un célibataire possédant deux vaches et six brebis est riche à notre sens ; le même troupeau détenu par une famille nombreuse la classe dans les pauvres et, ce, d'autant plus qu'elle est plus nombreuse.

On retient donc l'équivalence suivante entre la façon de voir les choses en 1789 et notre perception actuelle par le TRI.

Consigne du sel Pauvres Très médiocres Médiocres Aisés
TRI Misère
Pauvreté
(Misère)
Pauvreté
Pauvreté
Précarité
Précarité dépassée
Aisance   Richesse

La richesse et de la pauvreté des Fontcouvertins au cours du temps

Nous fondant sur les animaux, l'analyse de la richesse au cours des siècles s'appuie principalement sur les consignes du sel mais aussi sur le recensement de 1561 qui mentionne le bétail de cette période ancienne.

Parmi les calculs réalisés, seuls les niveaux de richesse sont présentés pour chaque groupement familial et pour les personnes qui le constitue en attribuant à chacun de ses membres le niveau de richesse commun au groupement.

Il faut encore rappeler la difficulté, voire parfois l'impossibilité, d'estimer les niveaux de richesse d'un groupement. Par contre, une impression d'ensemble peut être acquise, en particulier son évolution au cours du temps.

1561

Comparée aux situations suivantes, celle de 1561 apparaît comme relativement favorable. En fait, elle correspond à des conditions particulières :

Ainsi, une population réduite exploiterait toutes les ressources pastorales du terroir de Fontcouverte.

Et pourtant, la pauvreté et même la misère sont bien présents : un peu plus de la moitié des feux seraient dans ces cas. 20 % seraient dans la précarité, un petit quart dépasserait la précarité et tendrait vers une certaine richesse. La survie paraît difficile pour bien des Fontcouvertins au milieu du XVIe siècle.

1726

Un siècle et demi plus tard, la situation tendrait à se normaliser, la répartition des groupements et des personnes paraissant plus proche d'un certain équilibre social et économique.

Bien que toujours présente, la misère plus ou moins profonde concerne encore plus du tiers des groupements. Mais seulement la moitié est pauvre ou à peine mieux maintenant tandis qu'un dizième dépasserait la précarité.

1734

Huit ans seulement plus tard la situation ne présente pratiquement pas d'évolution par rapport à 1726. Elle est ainsi confirmée.

1759

En un quart de siècle la situation s'améliore encore, marquée principalement par la forte régression de l'extrême misère, voire de la simple misère.

1789

Enfin, 30 ans plus tard, les conditions restent pratiquement les mêmes avec la forte prédominance ces pauvres.

Malheureusement pour la suite, les archives ne nous donnent plus d'information concernant la vie à Fontcouverte. Il aurait été intéressant de constater les évolutions possibles et probablement importantes au cous du XIXe siècle.

Une tendance globale

Ainsi, au cours de deux siècles et demis entre 1561 et 1789, peut-on constater l'extrême pauvreté de la population de Fontcouverte, misère que l'on a du mal à imaginer de nos jours et pourtant bien réelle. Il ne s'agit pas seulement de notre propre perception mais bien, aussi, de celle perçue sur place à l'époque comme nous l'indique le secrétaire en 1759. Si la richesse ne croît pas de façon sensible, au moins la misère semble reculer au cours des XVIIe et XVIIe siècles