Fontcouverte
 

Que se passe-t-il entre les naissances successives ?

Le sens de la comparaison entre les intervalles protogénésiques et intergénésiques

Les évènements qui interviennent entre les naissances successives sont donnés à l'occasion de l'analyse de la fécondité : temps mort en l'attente d'une ovulation favorable, délai de conception suite à la réapparition de l'ovultion et fécondation plus ou moins tardive et durée de la grossesse en cas de conception.

Dans le cas d'une première naissance, les phases successives sont les mêmes mais le temps mort en l'attente d'une ovulation est, a priori, très réduit par rapport aux naissances suivantes.

La différence entre la durée moyenne de l'intervalle intergénésique et celle de l'intervalle protogénésique traduirait donc les variations du temps mort et du délai de conception. Ce dernier variant avec l'ordre d'apparition des enfants dans la famille, l'écart entre l'intervalle protogénésique et le premier intervalle intergénésique serait le plus caractéristique de l'allongement du temps mort.

Estimation de la différence des intervalles

Utilisant toutes les naissances pour lesquelles nous possédons les éléments permettant de calculer les deux types d'intervalles dans l'ensemble du temps de 1587 à 1900, des graphiques sont établis portant en supperposition la répartition que nous connaissons des intervalles protogénésiques à celle des intervalles intergénésiques en distinguant la taille finale des familles (de 2 à 10 accouchements) et le rang de ces intervalles correspondants. Les proportions des intervalles observés sont regroupées par trimetres, temps indispensable à des représentations significatives.

Les deux graphiques ci-contre, donnés à titre d'exemple représentatif, sont relatifs aux familles à 10 accouchements avec, en noir, la courbe des proportions des intervalles protogénésiques et, en brun, sous forme de bâtons, les proportions trimestrielles des intervalles intergénésiques. Le graphique de gauche correspond à l'intervalle intergénésique 1 - 2 (le premier), celui de droite l'intervalle 9 - 10 (le dernier).

Les graphiques révèlent clairement les faits suivants :

On confirme ainsi l'accroissement général du temps mort et du délai de conception après le premier enfant, cette augmentation présentant un caractère aléatoire d'autant plus grand en moyenne que les mères sont plus âgées.

Comparaison des intervalles 1 - 2 en fonction du nombre d'accouchements des familles

On sait que les intervalles intergénésiques décroissent avec le nombre des accouchements des familles. Les graphiques suivants présentent, de gauche à droite, le premier intervalle intergénésique des familles à 2, 6 et 9 accouchements confirmant ce fait.

Ils montrent la décroissance moyennne des intervalles avec le nombre d'accouchements. Cependant, si les deux premiers trimestres ne manifestent pas de différences notables, c'est du côté des intervalles élevés que se fait la discrimination. L'étalement des intervalles y est faible pour les familles à 9 accouchements, forte por celles à 2 accouchements. La fécondité des mères des familles à 9 accouchements est élevée et le reste longtemps, les naissances reviennent régulièrement et rapidement. Au contraire les familles à seulement 2 accouchement ont une fécondité aléatoire.

Comparaison des intervalles successifs dans une famille de taille donnée

Les cinq graphiques donnent, pour les familles à 9 accouchements, les intervalles 1 - 2, 3 - 4, 5 - 6, 7 - 8 et 8 - 9. s'échelonnant entre le premier et le neuvième accouchement.

Ils montrent le lent allongement des intervalles au fur et à mesure des accouchements, plus brutal pour le dernier.

Ici, encore, on constate que la différentiation se fait surtout par l'étalement des intervalles de rang élevé.

De nouveau, la baisse progressive de la fécondité manifeste la présence, croissante avec l'âge des mères, de phénomènes dispersants qui nous échappent en dehors de la seule baisse de la fécondité avec l'âge. Pourtant quelques mères persistent longtemps à avoir des intervalles intergénésiques très faibles jusqu'à l'intervalle 7 - 8.

La différence en chiffres entre intervalles protogénétiques et intergénésiques

La mesure de cette différence est particulièrement difficile :

Nous tentons de caractériser les écarts entre intervalles intergénésiques et protogénésiques à partir :

Les valeurs données en mois sont approximatives et issues de graphiques de proportions mensuelles d'interprétation délicate.

Les écarts de début des distributions (en mois) sont alors les suivants dans les divers cas.

Intervalles 1-2 2-3 3-4 4-5 5-6 6-7 7-8 8-9 9-10 Moyenne
2 accouchements 1                 1
3 accouchements 1 3               2
4 accouchements 2 1 2             2
5 accouchements 1 1 1 2           1
6 accouchements 1 2 2 1 3         2
7 accouchements 2 3 1 2 2 3       2
8 accouchements 1 1 2 3 0 3 1     2
9 accouchements 1 3 3 2 2 3 2 4   3
10 accouchements 1 0 2 2 2 2 1 1 2 2

Globalement, on peut admettre que les naissances les plus rapides à apparaître se font en moyenne 2 mois plus tard que pour les premiers enfants des familles. Les écarts montrent très peu d'évolution tant avec le rang de l'intervalle qu'avec le nombre d'accouchements des familles. Ces 2 mois correspondraient aux 2 mois d'aménorrhée postnatale données par les gynécologues.

Les écarts relatifs en mois aux pics des proportions sont, de leur côté, établis en repérant sur des graphiques mensuels les pics qui apparaissent. Le groupement mensuel donne une bonne définition des pics quand ils sont nets. Malheureusement, pour les premiers intervalles (et quelques autres) des différentes familles, les maximums sont peu marqués et laissent une part non négligeables à la subjectivité. C'est donc sur l'ensemble du tableau que l'on peut établir une analyse globale. Les moyennes présentées excluent le dernier intervalle généralement plus élevé que les autres, image de la baisse de la fécondabilité avec l'âge.

Intervalles 1-2 2-3 3-4 4-5 5-6 6-7 7-8 8-9 9-10 Moyenne
2 accouchements 18                  
3 accouchements 9 4               9
4 accouchements 16 11 39             13
5 accouchements 19 24 36 36           26
6 accouchements 13 18 36 37 29         26
7 accouchements 11 16 23 22 28 27       20
8 accouchements 19 28 26 23 26 27 29     24
9 accouchements 19 21 18 21 19 19 27 26   20
10 accouchements 14 14 20 21 18 21 24 24 27 19

On constate, pour autant que les pics des proportions de intervalles intergénésiques puissent être estimés correctement et en excluant les familles à 2 et 3 accouchements à la fécondité particulièrement faible, que ces écarts sont supérieurs de 22 mois environ aux intervalles protogénésiques. Le pic des intervalles intergénésiques apparaît bien plus tardivement que celui des intervalles protogénésiques. On constaterait ainsi un accroissement important du temps mort et du temps de conception entre la première naissance et les suivantes, temps global décomposable en 2 mois de délage initial (aménorrhée postnatale) et 20 mois d'étalement moyen des conceptions.

Un effet global possible

La distribution des intervalles protogénésiques nous renseignent sur ce qui se passe entre le mariage et la première naissance c'est à dire principalement ce qui concerne la fécondabilité (s'y ajoute le temps de gestation mais qu'on retrouve égal dans les intervalles intergénésiques). Les naissances apparaissent relativement très groupées dans l'année (voire les toutes premières années) qui suit le mariage. Les naissances sont une réaction relativement très rapide et brusque (les mathématiciens parleraient d'une « réponse impulsionnelle » au mariage !)

Les écarts des intervalles intergénésiques, différés et étalés dans le temps comparativement aux protogénésiques, révèlent que les conceptions suivant la première sont soumises à des effets retardateurs et dispersants. La distribution des intervalles intergénésiques n'est plus de nature impulsionnelle mais tend vers une distribution de plus en plus étalée et symétriques (on croit tendre vers une répartition classique en statistique rencontrée pour des phénomènes soumis à de nombreuses influences aléatoires).

Comment expliquer les 22 mois supplémentaires des intervalles intergénésiques par rapport aux intervalles protogénésiques ?

Parmi les composants temporels d'un intervalle intergénésique, celui du temps mort est largement soumis à des variations importantes. S'y ajoutent des temps induits par les habitudes des Fontcouvertins en matière de fréquence de leurs rapports sexuels variables suivant le temps de vie commune ainsi que les contraintes de la vie courante, les jeunes enfants vivants de la famille conditionnant l'activité de la mère. Ces deux derniers phénomènes nous échappent complètement.

On peut avoir une idée seulement sur les trois phénomènes les plus importants.

L'allaitement maternel

On sait que cette pratique conduit à une prolongation du temps mort après un accouchement, du moins tant que l'allaitement est pratiqué ce qui dépend des habitudes de la mère et de la survie du nourisson. Des observations analysées à Fontcouverte montrent qu'un allaitement de 10 à 12 mois est possible qui conduirait, en moyenne, à un allongement du temps mort de 6,5 mois et constituerait bien un effet important.

L'aménorrhée postnatale

Elle induit, après un accouchement préalable, un temps mort supplémentaire de 2 mois constaté plus haut.

Les variations du délai de conception en liaison avec la fécondabilité

Il nous est impossible, avec les données que nous posédons, de distiguer le temps mort du délai de conception. Nous ne savons pas si le temps mort ne varie pas ou peut être fonction de l'âge de la mère (il est en tout cas d'une durée minimale de 2 mois liée à l'aménorrhée). Nous admettons alors que les délais de conception sont les principaux responsables de la différence entre intervalles intergénésiques et protogénésiques une fois éliminés les effets de l'allaitement.

L'analyse des intervalles intergénésiques moyens en fonction du nombre d'enfants des familles montre clairement la décroissance de l'intervalle moyen en fonction du nombre d'enfants, décroissance que l'on pourrait attribuer à la haute fécondabilité apparente des mères ayant le plus d'enfants. Compte tenu de la répartition des familles suivant leurs nombres d'enfants, une estimation approximative de l'intervalle moyen serait alors de 14 mois, temps très fortement influencé par le nombre des naissances et les âges de la mère et donc plutôt lié à la période de conception. Si l'on élimine l'allongement de 6 mois du temps mort dû à l'allaitement et des 2 mois d'aménorrhée postnatale, on pourrait estimer que 6 mois de l'allongement moyen des intervalles protogénésiques seraient liés au délai de conception de l'ensemble des naissances suivants la première.

Globalement, et sous toutes réserves de nos approximations

On pourrait admettre que l'allongement de 22 mois des intervalles intergénésiques moyens par rapport aux protogénésiques serait dû ;

Il reste encore 8 mois, soit un tiers du délai que nous étudions, que nous ne savons interpréter. Bien des raisons peuvent intervenir : le mari fait du colportage, les enfants déjà nés occupent bien la mère... et nos archives ne sont pas faites pour des études fines sur la vie des Fontcouvertines.