Fontcouverte
 

Veuvage et remariages à Fontcouverte

L'analyse des âges au mariage nous renseigne sur la fréquence de mariages rompus par la mort d'un des conjoints au cours des siècles. Mais un autre point significatif est le délai que met un veuf ou une veuve à se remarier. On peut s'attendre à ce que ce délai soit relativement court, le conjoint restant se trouvant confronté à des problèmes matériels importants difficiles à surmonter dans des conditions de vie souvent difficiles.

Les durées du veuvage

La lecture des actes de mariage réserve parfois des surprises étonnantes. Par exemple, un veuf se remarie trois semaines après le décès de sa femme, des bans n'ont pas le temps d'être publiés et des dispenses de consanguinité ou d'empêchement pour liens d'affinité (remariage d'un veuf avec la sœur de son épouse défunte entre autre) sont obtenues rapidement de l'évêque.

Une veuve qui a eu l'opportunité de se remarier très vite.
Pierre Bonnel est mort trois mois et demi auparavant le 1er mai 1676.

On reste admiratif devant l'organisation matrimoniale de Fontcouverte qui permet des délais aussi courts... bien mieux que les clubs de rencontre sur internet !

Les spécialistes du folklore savoyard (et de bien d'autres régions) nous rapportent qu'au repas du soir de l'enterrement du défunt, la famille réunie seule à ce repas aborde le sujet du remariage et discute des opportunités qui se présentent. Tout peut donc aller vite même si la mort du défunt était imprévisible.

Les raisons de la rapidité de remariage d'un veuf sont évidentes. Celui-ci est dans l'incapacité presque totale de s'occuper de sa famille : les enfants, surtout s'ils sont très jeunes, voire des nouveaux nés après une mort en couche de la mère, et les tâches ménagères ne font pas partie des occupations masculines.

Pour une veuve, la situation est relativement moins dramatique, au moins à court terme. Si elle est totalement apte aux travaux de la maison, elle est aussi souvent capable de participer efficacement aux travaux agricoles. Cette polyvalence la rend moins vulnérable au veuvage mais la situation peut devenir catastrophique si elle dure.

Il paraît donc intéressant d'étudier dans quels délais une veuve ou un veuf est susceptible de se remarier.

Les possibilités de remariage risquant d'être fonction de l'âge du conjoint survivant au moment de son veuvage, trois cas sont distingués :

dans la mesure où l'on estime que les mariages au delà de 50 sont pratiquement inexistants.

Nous calculons les probabilités de remariage sur la période globale 1587 - 1900 des débuts de veuvage pour obtenir des effectifs statistiquement utilisables. Il est alors impossible de connaître d'éventuelles variations des habitudes dans le temps. Pour chaque cas, l'effectif qui est traité est précisé. Quant à la durée maximale de veuvage analysée, elle est arbitrairement fixée à 10 ans bien que quelques remariges plus tardifs puissent exister.

Dans les calculs, il est admis qu'aucun veuf ne meurt pendant sa période de veuvage. Cette hypothèse paraît admissible dans la mesure où la mortalité aux âges considérés est très faible. Elle est cependant d'autant plus discutable que l'on s'intéresse à des veuvages plus tardifs et que l'on remonte dans le temps (au cours des siècles, le nombre de veuvages étudiés décroît et prend donc une influence plus faible dans l'échantillon).

Les trois graphiques suivants tracent la proportion des veufs et veuves en fonction de leur délai de remariage. La proportion est portée en cumulé c'est-à-dire qu'il s'agit de la probabilité de remariage avant un délai donné et non à un délai donné.

Il importe de noter que les effectifs soumis à l'analyse sont relativement très faibles. Les conclusions à tirer des graphiques peuvent être fortement conditionnées par le contenu des échantillons. Quant aux comparaisons possibles avec la bibliographie, elles sont difficiles dans la mesure où les hypothèses de calcul, bien que déterminantes dans les résultats, ne sont généralement pas exactement précisées.

Les veufs et veuves à 30 ans au plus

Le graphique est relatif aux veufs et veuves de la première tranche d'âge qui correspondent à l'époque de la vie où la famille est en pleine construction. La réparation du départ d'un conjoint s'impose fortement avec la différence des conséquences évoquées ci-dessus suivant le sexe. La différence constatée est très nette tant sur le niveau que sur la rapidité de remariage .

Les veufs et veuves à 31 - 40 ans

Le graphique est cette fois relatif aux ménages qui ont dèjà établi une part importante de leur famille.

Les veufs et veuves à 41 - 50 ans

Le troisième graphique concerne des veufs et des veuves dont les familles ont pratiquement fait le plein de leurs enfants. La contrainte est alors sans doute une question de survie.

On peut encore noter une particularité strictement spécifique aux veuves. Leur taux de remariage ne croît que très lentement au cours de leurs dix premiers mois de veuvage et, ce, quel que soit l'âge. Il s'agit là de l'effet de la règle du délai de viduité empêchant une femme de se remarier dans les 300 jours suivant son veuvage afin d'éviter toute confusion de paternité ou incertitude d'un enfant à venir.

L'influence du nombre d'enfants à charge sur le remariage

La bibliographie signale que la facilité pour un veuf ou une veuve de se remarier peut également dépendre du nombres d'enfants encore vivants au foyer au moment du veuvage. La structuration de la population permettrait aisément une telle étude, le nombre d'enfants à charge, avec leur âge exact, pouvant être très facilement calculé. Cependant, ce nombre étant fortement corrélé à l'âge des époux, il est très difficile de distinguer l'influence de ce facteur de celui de l'âge du survivant. On peut penser que les deux facteurs interfèrent fortement sans que leur séparation soit possible du fait du nombre très réduits des cas traitables à Fontcouverte.