Fontcouverte
 

Le mariage pour tous... ou seulement pour certains ?

S'il est assez facile de connaître les personnes mariées, il est plus difficile de reconnaître celles qui restent célibataires laissant peu de traces dans les archives d'état civil. Pourtant, les célibataires sont théoriquement complémentaires des mariés.

La structuration de la population permet le plus souvent de déterminer l'état matrimonial d'un Fontcouvertin à son décès. Au XVIIe siècle, l'identité sociale appliquée aux actes de décès est une aide intéressante pour estimer l'état de célibat d'un individu. Mais elle n'est pas infaillible et n'a pas toujours pu être mise en œuvre. Il n'y a guère qu'après 1861 que le statut matrimonial est systématiquement précisé dans les actes de décès. Le problème est rendu encore plus complexe par les émigrations définitives qui nous privent éventuellement de la connaissance du mariage des personnes qui ont quitté la paroisse.

Les démographes ont l'habitude de traiter la proportion des célibataires plutôt que celle des mariés. En effet, pour le célibat, on bénéficie du fait :

Pour déterminer les célibataires à leur décès d'un échantillon de population il suffit donc :

Les données nécessaires à la détermination de la proportion des célibataires dans la population

Les archives d'état civil permettent donc d'étudier assez facilement le célibat par des voies détournées.

L'analyse entreprise porte sur la génération des personnes nées une année donnée complétée d'un certain nombre d'années symétriquement disposées, par exemple ± 5 ans, pour obtenir un effectif suffisant. Les résultats du calcul de la proportion des célibataires dans la population à un âge donné sont alors une moyenne sur 10 ans. Si l'on répète le calcul d'année en année au cours des siècles, on obtient l'équivalent d'une moyenne mobile sur 10 ans qui estompe les fluctuations rapides des fréquences pour laisser apparaître les tendances à moyen et long terme.

L'état de célibat de chaque personne à un âge donné est donc entièrement défini par :

La date de décès des personnes mariées n'a pas d'utilité. Cette opportunité permet d'augmenter considérablement la taille des échantillons utilisables dans la mesure où nombre de Fontcouvertins se marient bien qu'on ne connaisse pas leur date de décès (cette opportunité semble avoir été souvent oubliée dans la bibliographie qui s'appuie alors sur la seule précision de l'état matrimonial au décès quant il est connu soit guère avant 1792 en France et 1862 en Savoie).

Dans les échantillons traités, sont pris en compte les mariages et les décès quel que soit le lieu où ces événements se sont produits, très généralement Fontcouverte mais aussi, parfois, dans des paroisses voisines. Il est en effet probable que dans ces derniers lieux les conditions de mariage et de décès soient semblables à celles de Fontcouverte. Des émigrés dont les dates de naissance, de mariage ou de décès sont connues ont été également incorporés aux échantillons, en particulier au XIXe siècle.

Dans ces conditions, on peut réaliser un calcul de la fréquence du célibat avec une assez bonne précision.

Evolution de la proportion des célibataires et des mariés en fonction de l'âge

Remarque concernant les dates ou les âges de référence du célibat. Le constat du célibat d'une personne peut se référer à diverses dates au cours du temps ou à divers âges de cette personne :

Suivant les cas nous utilisons ces diverses références en les précisant. On doit alors tenir compte du fait que 25 ans en moyenne s'écoulent entre la naissance et le mariage et 50 ans entre la naissance et la date de célibat définitf.

Les graphiques suivants illustrent la proportion (ou fréquence) des célibataires (et par complément celle des mariés) en fonction de leur âge pour différentes périodes de dates de naissance caractéristiques dont le choix est justifié ci-dessous (pour obtenir l'âge de constat du célibat définif, ajouter 50 ans à la date de naissance). Les calculs sont réalisé sur un épisode de 40 ans centré sur la date de référence.

1600 (1587 - 1620) 1730 (1710 - 1750) 1780 (1760 - 1800)

1820 (1800 - 1840) 1900 (1180 - 1920)

On voit que la totalité des individus très jeunes sont tous célibataires jusqu'à un âge prescrit par le droit canonique jusqu'en 1861 ou la loi républicaine après cette date. La proportion des célibataires décroît ensuite en fonction des habitudes de mariage puis se stabilise à partir de 50 ans environ, les célibataires à cet âge n'ayant pratiquement plus aucune chance de se marier. Mais de grandes variations des valeurs des proportions, en particulier aux âges élevés, s'observent au cours des siècles probablement sous l'effet des habitudes matrimoniales mais surtout des conditions démographiques, économiques et sociales.

La proportion des femmes peut être pratiquement égale à celle des hommes ce qui traduirait une période d'équilibre démographique. Dans d'autres cas, la proportion des hommes est relativement faible, indice d'un déséquilibre démographique en relation possible avec l'émigration masculine.

Un calcul de la fréquence du célibat définif au cours des siècles permet d'observer ses variations dans le temps présentées dans le graphique suivant (calculs par générations de 10 ans glissant annuellement) où les années sont celles du constat du célibat définif soit 50 ans après la naissance.

Soit en résumé pour quelques dates caractéristiques :

Date de naissance 1600 1730 1780 1820 1900
Date de célibat définitf 1650 1780 1830 1870 1950
Date moyenne de mariage possible 1631 1755 1805 1848 1926
Frequence du célibat définitif des hommes 20 % 10 % 25 % 35 % 24 %
Frequence du célibat définitif des femmes 20 % 7 % 25 % 43 % 24 %

Il apparaît trois périodes principales se différenciant nettement.

Obervé de 1650 et jusqu'en 1775 environ (50 ans après la naissance) le célibat définitif est relativement faible et décroissant, passant de 20 % à 10 % pour les hommes et de 20 % à 7 % pour les femmes, ces dernières montrant cependant un épisode de célibat définitif accentué entre 1740 et 1760.

Observé de 1775 environ à 1830 (50 ans après la naissance) le célibat définitif croit régulièrement pour atteindre un maximum de 25 % tant pour les hommes que pour les femmes. Cet épisode est marqué par un équilibre pratiquement parfait pour les deux sexes.

Observé de 1830 à 1900 (50 ans après la naissance) le célibat définitif croit régulièrement pour les hommes pour atteindre environ 35 % avec de fortes variations tandis que celui des femmes augmente très fortement à partir de 1840 pour atteindre 45 % en 1850, se stabiliser jusqu'en 1880, puis redescendre à un niveau stable de 37 % jusqu'en 1910.

L'analyse réduite aux personnes nées et décédées à Fontcouverte (excluant en principe les émigrants définitifs) donne des résultats très voisins.

Manifestement, après une longue période relativement faste au mariage, les natifs du XIXe siècle ont été soumis à une importante contrainte sur les opportunités de leur mariage réduisant les possibilités de la population de se développer.

Ainsi, l'analyse du célibat permet de distinguer ;