Difficultés et hypothèses du calcul des morts pesteuses
dans le diocèse de Maurienne en 1630

98 paroisses sont reconnues en 1630 : 97 dans le document épiscopal et La Rochette dans la bibliographie :

• la paroisse de Jarrier ne permettant pas d’aborder correctement le thème de notre étude est éliminée des calculs,
• 37 paroisses permettent une certaine estimation de la date de début et de fin d’épidémie définissant pour nous la période épidémique et du nombre des pesteux,
• 2 paroisses (Saint-Jean-de-Maurienne, Aussois) donnent le début de l’épidémie mais ne permettent pas l’observation directe du nombre des pesteux,
• 58 paroisses ne permettent aucune étude (dont Saint-Michel-de-Maurienne).

Des informations bibliographiques donnent une estimation éventuellement très approchée du volume de leur population aux 98 paroisses.

Dans les lignes qui suivent nous présentons des valeurs numériques telles que les calculs nous les donnent. Il est évident que les deux premiers chiffes significatifs, parfois même moins, ont un sens.

Le volume de la population

Le diocèse de Maurienne comprend en 1630 :

• 69 paroisses conservées depuis par le diocèse (assimilé à l’arrondissement administratif de Saint-Jean-de-Maurienne en 1801),
• 29 paroisses rattachées après 1630 au diocèse de Chambéry et situées en rive gauche de l’Isère entre Monthion, Notre-Dame-des-Millières au nord et La Rochette au sud qui n'est pas citée dans le document de l'évêché.

La population du diocèse serait ainsi estimée à 54159 habitants dont :

• 42319 dans l’arrondissement de Saint-Jean-de-Maurienne (à comparer à la population de l’arrondissement connu en 1801 soit 45000 habitants),
• 11840 hors de l’arrondissement.

L’écart observé dans l’arrondissement de Saint-Jean-de-Maurienne (6 %) entre notre estimation et celle donnée par la bibliographie peut résulter des faits suivants :

• une évolution faible de la population entre 1630 et 1800 (phénomène connu de saturation de la population) limitant les erreurs importantes,
• une incertitude réelle dans l’estimation de la population des paroisses en 1630,
• un biais possible non négligeable (à la surestimation) dans la valeur de 1801,
• La non prise en compte dans les regroupements paroissiaux de petites communautés.

Cette sous‑estimation n’a qu’un faible effet dans le calcul du taux global de mortalité pesteuse sur la Maurienne.

Effectif des mourants toutes causes confondues pendant la période épidémique.

4 paroisses supportent une lacune importante et irrémédiable des effectifs enregistrés : Saint-Jean-de-Maurienne, Saint-Michel-de-Maurienne, Aussois ainsi qu’Aiguebelle dont l’enregistrement des décès est très partiel mais bénéficie d’une estimation globale particulière dans les documents épiscopaux hors des listes des décès de l’état civil.

D’autres lacunes moins importantes mais significatives (lacunes momentanées en cours ou en fin de période épidémique) s’observent dans diverses paroisses.

Le nombre de décès en période épidémique rapporté au volume de la population à Saint-Jean-de-Maurienne, Saint-Michel-de-Maurienne et Aussois est supposé dans nos calculs, mais sans certitude, de 37 % (on retrouve cependant bien cette proportion arbitraire à Aiguebelle, nettement inférieure aux 47 % de Modane). Des tests de cette hypothèse (50 %, 25 %) montrent une faible sensibilité du résultat final.

Enfin, cet effectif des mourants est soumis aux difficultés de détermination de la période épidémique exacte.

Effectif des morts pesteux

La connaissance de l’effectif des morts de peste est rarement offerte par les documents épiscopaux. Quand elle est précisée, elle est souvent sujette à caution (incomplétude des informations sur les pesteux).

Une détermination indirecte est tentée à partir de l’effectif des mourants de la période épidémique :

• par élimination des morts naturelles dont la moyenne annuelle estimées sur les années environnantes si possible antérieures ou postérieures mais, dans ce dernier cas, éloignées de la période épidémique ; cette détermination est rendue aléatoire du fait de la présence possible de petites épidémies non pesteuses classiques, difficiles à identifier sur un nombre réduit d’années et par nature d'occurrence très aléatoire,
• par analyse de la courbe des cumuls (ci‑contre celle d'Albiez-le-Vieux pour exemple) butant sur une incertitude temporelle réduite au début de l’épidémie et une incertitude importante en fin d’épidémie, doute portant cependant sur des effectifs faibles ; les morts pesteuses sont heureusement en nombres réduits aux extrémités de l’épidémie.

On constate de façon générale qu’en période épidémique les morts naturelles sont toujours très peu nombreuses (moins de 10 %) dans le total de mourants. Des valeurs nettement plus faibles s'observent dans des cas très particuliers comme Modane. L’emploi dans les estimations de la bibliographie du total des décès serait ainsi une surestimation acceptable si l’on ne tenait pas compte de tous les morts de l'année 1630 (emploi global des données de l’état civil sur l'année synodale).