Fontcouverte
 

Le journal de santé de Fontcouverte de 1630 à 1632

Ce journal est rassemblé dans 3 livrets retraçant l’enregistrement des actions du dispositif de santé du 14 août 1630 au 1er juin 1632, au total 233 pages relatant environ 400 actions élémentaires que nous appelons « articles », nombre approximatif du fait que certains articles regroupent en fait plusieurs actions ou décisions prises le même jour.

Le journal n’est pas de lecture facile bien que rédigé par deux secrétaires successifs, notaires à Fontcouverte, Jacques Chaudet puis Antoine Girollet. C’est peut‑être pour cela que l’on parle de ce document considéré comme exceptionnel mais dont personne, semble‑t‑il, n’a produit de transcription à la fois éclairée et exhaustive. Nous n’avons fait guère mieux. Cependant nous avons passé beaucoup de temps à lire attentivement la totalité des textes de façon à en extraire pratiquement tout le sens même si des mots nous ont échappé, voire même quelques membres de phrases. Parmi les 400 articles rapportés, ce que nous avons compris des cas les plus intéressants est reproduit, en français de nos jours, dans le texte de l'étude.

Les secrétaires se font rapporter les évènements de la journée avant de les inclure au journal. Parfois les notes d’un jour sont reportées tardivement ce qui provoque des chevauchements chronologiques. La référence d’un article à un autre n’est alors pas toujours claire. Ainsi les dates ne sont‑elles pas certaines au jour près. En particulier les dates des décès ne sont pas mentionnées systématiquement. Au mieux connait‑on celle de l'inhumation, voire celle du passage différé des personnes visitant les corps. La concordance avec les dates de l’état civil n'est que le résultat du réemploi religieux des informations laïques.

Mise en cabane de Claudine femme de Jean Louis Poingt
et de ses enfants à la Brévière

Une illustration de ces difficultés de transcription d'un article très simple du secrétaire Antoine Girollet est donnée ci‑contre. Une lecture rapide permet de lire : « Le 22 dudit mois la Claudine femme dudit Poingt et ses enfants ont été conduits pour faire quarantaine au dessous de la Brévière [...] et ce [...] des syndics [...] et ont été conduits par ledit Claude Poingt et par [...] ». Avec plus d'attention des éclaircissements sont apportés. Par ailleurs, la date du 22 septembre, à en croire une déduction logique du mot « dudit » serait une erreur, il s'agit du mois d'octobre comme le précise la chronologie d'articles antérieurs et la suite des évènements. Ledit Poingt est Jean Louis Poingt mort la veille dans sa maison de la Côte des Reymonds. Il est clair que, même sans les efforts supplémentaires, il s'agit pour nous de la mise en cabane d'une famille suite au décès par peste du père.

Le contenu du journal

Suivant l'action concernée, un article peut prendre des formes différentes.

Les articles traitant de la visite des malades ou des décédés donnent ainsi les informations suivantes :

D'autres types d'articles procurent des informations sur la vie à Fontcouverte pendant la peste : séquestration des maisons et des villages, gestion de la garde des séquestrés, relégation en cabane des personnes contagieuses ou suspectées telles, problèmes particuliers comme la recherche de personnes compétentes pour désinfecter les maisons, assemblées générales de la communauté pour nommer le personnel du comité de santé, contacts avec les autorités de santé de Saint-Jean-de-Maurienne...

Les syndics doivent aller à Saint-Jean
pour obtenir la fin de quarantaine de Jean Combaz

Voici par exemple les Syndics mis à contribution dans des activités administratives auprès des autorités de santé de Saint-Jean-de-Maurienne. « Le 18 février 1632 honnête Jean Antoine Boisson syndic est allé à la cité présenter requête pour l’élargissement de Jean Combaz et y est encore retourné le 19 dudit après avoir été à Fontcouverte faire son rapport [...] de la communauté. ».

A partir de ces informations, il est généralement possible d’identifier les personnes en cause dans la structuration de la population de Fontcouverte. Une difficulté certaine apparaît cependant du fait que les personnes adultes sont souvent nées avant le début des archives d’état civil réellement utilisables (on ne connaît alors que leur mariage éventuel et leur décès). Cependant, en ne considérant que les personnes visitées pour maladie ou décès et excluant les membres du comité de santé revenant de façon récurrente ainsi que les gardiens, enterreurs, cureurs, témoins ou étrangers à la paroisse, seules 15 % d'entre elles ne sont pas reconnues (manque d'informations sur leur environnement familial dans le journal de santé, lacunes ou imprécisions de la structuration de la population). Parmi les 85 % restantes 55 % sont trop âgées pour que leur naissance soit connue et peuvent parfois être identifiées de façon incertaine, 45 % étant très probablement identifiées de façon correcte.