Fontcouverte
 

La mortalité des adolescents et des adultes
La loi de Gompertz - Makeham... et d'autres

Les lois de mortalité

Très tôt, les démographes ont tenté de donner aux phénomènes de la mortalité des adultes vieillissants, puis celle des adolescents et des jeunes adultes, une expression mathématique, c'est à dire de définir des modèles de comportement.

A leur suite nous utilisons ci-dessous, comme exemple, les quotients de mortalité des Fontcouvertins nés dans la première moitié du XVIIIe siècle, hommes et femmes confondus. Ceux-là illustrent bien l'évolution des probabilité de décès aux âges compris entre 10 et 90 ans après que la forte mortalité des plus jeunes a pratiquement totalement disparu.

Il est clair que les distinctions suivantes doivent être faites :

Loi de Gompertz pour les grands adultes

Dès 1825, Benjamin Gompertz constate déjà la rapide augmentation de la force de mortalité à partir de l'âge adulte. La force de mortalité est un concept directement lié au quotient de mortalité, les deux indicateurs ne se différenciant réellement que pour les quotients très élevés (pour le dernier mourant, le quotient vaut 1 alors que la force de mortalité tend vers l'infini). Pour simplification, nous assimilons ici quotient et force de mortalité en évitant de nous appuyer sur les quotients de mortalité aux âges élevés par ailleurs définis de façon incertaine sur des nombres d'individus très réduits.

Gompertz estime que la force de mortalité a une composante dominante liée à une détérioration des corps ou à une réduction de la capacité à lutter contre la destruction physique, force qui est multipliée par une valeur constante chaque fois que l'âge augmente d'un an.

Il admet ainsi que la mortalité suit une loi du type      ma = B . ea     dans laquelle :

Loi de Makeham incluant les adolescents et les jeunes adultes

En 1860 William Makeham s'en tient au fait que la force de mortalité entre 10 et 30 ans semble dûe à des causes indépendantes de l'âge. C'est pour cela qu'il propose la loi suivante complétant celle de Gompertz :

ma = A + B . ea    A étant un terme constant traduisant une mortalité de base sans relation avec l'âge.

La loi de Makeham suppose que cette force A se poursuit jusqu'à la fin de la vie ce qui ne paraît pas évident à justifier mais A prend rapidement une valeur marginale pour les âges élevés.

D'autres lois encore

Devant l'abondance actuelle des centenaires, de nombreuses autres lois (dont la loi logistique qui paraît assez séduisante) ont été proposées pour tenir compte, en particulier, du fait que des populations présentent, en contradiction avec la loi de Gompertz, une nette réduction de la vitesse d'accroissement de la force de mortalité aux âges les plus élévés : il semblerait alors que certains individus soient susceptibles de vivre nettement plus longtemps que leurs congénères. Ils constitueraient alors une sous-population de personnes plus résistantes noyée dans la polulation aux âges intermédiaires mais devenant majoritaire voire exclusive aux âges extrêmes.

Le faible volume de la population de Fontcouverte et le nombre très réduit des personnes survivant aux âges très élevés rendent cette constatation pratiquement impossible aux époques qui nous préoccupent (le premier décès d'un centenaire est réservé au XXe siècle). Par ailleurs, l'emploi de quotients pluri-annuels jusqu'à l'âge du dernier survivant, conduisant à des valeurs encore instables et pouvant induire des erreurs d'interprétation, ne permettent pas de mettre en évidence la présence d'individus exceptionnellement résistants en quantité significative. Nous qui estimons que la population de Fontcouverte est globalement très homogène, nous voila confortés par les paroissiens les plus âgés... des Fontcouvertins comme les autres !

Application aux quotients de mortalité de la première moitié du XVIIIe siècle à Fontcouverte

Les lignes qui suivent sont justifiées par la curiosité qui s'impose de connaître à quel point la loi de Gompertz - Makeham est adaptée au cas de Fontcouverte. Il s'agit donc de déterminer statistiquement les deux paramètres A, B de la loi à partir des quotients de mortalité observés, de calculer ensuite pour chaque âge les valeurs données par le modèle et, enfin, de comparer ces valeurs à celles observées.

Le coefficient A de la loi de Makeham est estimé sur la courbe des quotients aux âges concernés (une simple moyenne, A étant supposé constant). Le coefficient B de la loi de Gompertz est ensuite déterminé par voie statistique (méthode des moindres carrés) sur le logarithme des quotients diminués du coefficient A de Makeham. Les valeurs obtenues conduisent au graphique suivant où est superposée la loi de Gompertz-Makeham aux valeurs des quotients effectivement observées.

Le modèle de Gompertz - Makeham paraît globalement assez satisfaisant. On note cependant que :

Le problème des âges très élevés

Peu visible sur l'exemple précédent de la première moitié du XVIIIe siècle, le manque d'adéquation de la loi de Gompertz aux mourants de plus de 70 ans est nette au XVIIe, époque à laquelle le phénomène se remarque tant sur les courbes des quotients que sur celles des log des quotients.

Diverses raisons peuvent être invoquées comme explications :

Pour remédier à ce dernier fait, nous avons dû développer un modèle spécial permettant d'approcher correctement des quotients de mortalité aux âges très élevés du XVIIe siècle.

Que faire des modèles ?

Les modèles mathématiques ainsi établis n'obligent pas les Fontcouvertins à mourir suivant ces normes qu'ils ignorent ! Ces modèles peuvent cependant être utiles pour « lisser » la succession des quotients annuels de mortalité ainsi que d'interpoler les valeurs des quotients entre les générations que nous avons traitées et, par exemple, estimer les quotients les plus vraisemblables à une date donnée par interpolation numérique dans le temps.

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