Fontcouverte
 

Indice Ig* de fécondité légitime à Fontcouverte

Le but de l’indice Ig est de mesurer l’écart entre la fécondité d’une population étudiée et celle d’une population-type réputée pour avoir une fécondité naturelle, c'est-à-dire ne pratiquer aucune méthode de limitation volontaire des naissances.

Ansley Coale a défini son indice Ig en se référant à la population hutterite, secte établie en Amérique du nord, observée au début du XXe siècle.

Le calcul consiste à établir le rapport

Coale estime qu’un indice inférieur à 0,6 dénote la présence d’une limitation des naissances dans la population étudiée.

La population huterrite présente des caractéristiques qui semblent assez différentes de celles propres aux populations anciennes comme celle de Fontcouverte :

Ces conditions peuvent conduire à une fécondité huttérite globale supérieure à celle des populations anciennes (en particulier du fait de conditions de vie et d'une répartition des âges plus favorables).

John Knodel, étudiant des localités allemandes plutôt rurales, propose le recours à une population-type différente, celle de l’Allemagne au recensement de 1871, conduisant à des résultats voisins de ceux de Coale.

Pour tenir compte des conditions réelles de vie à Fontcouverte (en particulier du taux de fécondabilité faible des Fontcouvertines), le plus simple consiste à se référer à la population de la paroisse entre 1650 et 1850, époque pendant laquelle les taux de fécondité sont stables et la limitation des naissances (au sens défini par les démographes) très probablement inexistante. La période 1600 - 1650 est éliminée, correspondant à une phase démographique particulière de Fontcouverte. La période 1850 - 1900 l’est également, des signes de limitation des naissances pouvant apparaître.

Le graphique montre alors qu'à Fontcouverte la répartition des taux de fécondité par tranches d’âge des mères s’écarte assez radicalement (par nette réduction à tous les âges dans un rapport voisin de 0,78) de celle des Hutterites. Cette constatation justifie le recours à la population-type que nous venons de définir.

Le tableau suivant résume les valeurs de taux de fécondité retenus par Coale pour les Hutterites et par nous pour Fontcouverte de 1650 à 1850.

Age révolu 15-19 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 45-49
Hutterites 0,300 (*) 0,530 0,502 0,447 0,406 0,222 0,061
Fontcouverte 0,220 0,396 0,403 0,366 0,321 0,189 0,039

(*) estimation faite par Coale plus plausible que la valeur 0,700 observée.

Nous définissons donc un indice IG* sur les bases de calcul de Ig mais se référant à la fécondité observée à Fontcouverte.

Ig* est alors le rapport calculé pour une période d’observation donnée

Dans ces conditions, l’indice Ig* devrait être voisin de 1 entre 1650 et 1850 et traduire la manifestation d’une limitation des naissances pour des valeurs de l'indice inférieures à 0,77 (par correction proportionnelle de 0,6 donné par Coale). C'est effectivement ce que montre le graphique, établi sur des périodes courtes de 25 ans, où le trait rouge traduit la limite de 0,77.

Nous devons tenir compte du fait que souvent les archives ne permettent pas de savoir si une famille a eu le temps de développer tout son temps reproducteur à Fontcouverte. L'analyse des familles complètes permet de distinguer les familles complètes (soit 922 utilisables) des familles que nous considérons comme incomplètes à la vue des archives (soit 1 286), 2 337 restant en toute rigueur indéterminées. Le graphique traduit les valeurs de Ig' calculées pour l'ensemble de toutes les familles, pour l'ensemble des familles complètes et indéterminées et pour les seules familles complètes.

Jusqu'en 1800, les trois courbes restent assez voisines. mais à partir de cette date elles s'écartent systématiquement, très probablement sous l'effet des émigrations importantes nous privant de nombreux enfants nés hors Fontcouverte. Nous retenons donc uniquement les valeurs de Ig' des seules familles complètes pour l'analyse de la période la plus récente.

Au plan qui nous intéresse, on note la valeur relativement faible de l'indice dans la période 1851 - 1900 qui se rapproche progressivement, bien qu'en en étant encore assez lointaine, du seuil de manifestation d'une limitation des naissances donné par Coale. En fait, nous ne savons pas à quoi correspond excatement ce seuil dans l'esprit de son auteur.

On pourrait, en tout cas, admettre que ces nouvelles pratiques n'apparaissent à Fontcouverte que dans la dernière moitié, voire plutôt le dernier quart du XIXe siècle sans pouvoir préciser quelle est la proportion des couples qui commencent à aborder ces méthodes ni connaître leur efficacité réelle et ainsi participer à ce que les démographes appellent « la transion démographique ».