La survie difficile des jumeaux

Les archives d’état civil de Fontcouverte donnent des actes de baptême/naissance indiquant clairement la naissance de jumeaux. Malheureusement tous n’ont pas pu être reliés à leur décès dans la structuration de la population (soit par manque d’informations soit suite à une émigration) pour connaître leur âge en fin de vie.

Inversement, on trouve des actes de sépulture/décès d’enfants morts à la naissance, en tout cas avant qu’ils aient pu être baptisés à l’église ou déclarés nés à la mairie. Ils n’ont donc pas d’acte de baptême/naissance mais dans les meilleurs cas une date de naissance est mentionnée sinon nous considérons qu’il s’agit d’une mort immédiate (nous appelons ces enfants « 0 jour »).

292 naissances de jumeaux correspondent à 146 accouchements gémellaires. Sur un total de 13 800 naissances à Fontcouverte environ, le taux d'accouchements gemallaires serait de 1 %. Aucun accouchement de triplés n'a été rencontré. Parmi ces 292 jumeaux, 249 ont un âge de décès connu.

La lecture des archives montre de façon souvent évidente que la mort de jumeaux correspond à des circonstances d’accouchements parfois dramatiques dont les conséquences peuvent être immédiates mais aussi différées.

La durée de vie des jumeaux mérite alors une analyse particulière même si celle-ci est difficile du fait du nombre très réduit de ces individus et si elle peut être biaisée.

La répartition des 249 jumeaux dont l’âge au décès est connu est la suivante.

Un cinquième des jumeaux meurt ainsi à la naissance. Les deux tiers restants décèdent avant 1 an. Les autres dépassent 9 ans révolus, certains pouvant vivre très âgés.

La survie des jumeaux au cours de leur premier mois de vie

Les courbes de survie suivantes précisent cette survie (en comparaison de la survie correspondante de l'ensemble de la population), en différentiant les périodes historiques. Sont présentées de gauche à droite :

• la survie de l'ensemble des « naissances » des 249 jumeaux,
• la survie des 201 jumeaux ayant survécu au moins un jours à leur naissance,
• la survie de la totalité des personnes dont on connaît l'âge à la mort, à titre de comparaison.

Les graphiques montrent à l'évidence une tendance générale à la forte mortalité des jumeaux. En moyenne, le tiers seulement des jumeaux (y compris ceux morts à la « naissance ») survivent seulement 20 jours. Une fois éliminés les morts à la « naissance », près de la moitié des nouveaux-nés survivent au terme du même délai. Ces valeurs sont à comparer aux 90 % de l'ensemble des personnes de la population que l'on peut considérer comme réellement nées.

Après les 15 premiers jours de vie, la mortalité est très fortement amortie.

Au cours des siècles, l'évolution est peu sensible mais le XIX^e siècle se distingue nettement une fois de plus par :

• la première moitié du siècle pendant laquelle la mortalité des jumeaux est particulièrement importante dans les 15 premiers jours de vie,
• la seconde moitié du siècle pendant laquelle, au contraire, la mortalité des jumeaux (comme celle des naissances unipares) est bien plus faible, en particulier pour ceux qui ont survécu à leur naissance. Encore un petit progrès en marche à Fontcouverte.

La survie des jumeaux au-delà de un mois

Il s'agit maintenent de déterminer quelle chance ont les jumeaux d'avoir une vie normale après avoir échapper à la forte mortalité de leur premier mois de vie. Les graphiques suivants sont relatifs aux mêmes effectifs que ceux pris en compte dans les graphiques précédents.

Les courbes de survie sont encore parfaitement claires. Les 20 à 30 % des survivants à leur premier mois ont une survie très réduite par rapport à ceux qui ont eu la chance de ne pas naître avec un frère ou une sœur. Jusqu'à la première moitié du XIX^e siècle, bien rares sont ceux qui atteignent la soixantaine (les 20 ans de XVII-1 sont une anomalie due à la limite de 1587 - 1603 des archives). Si la première moitié du XIX^e siècle poursuit son anomalie de forte mortalité jusqu'aux âges parfois élévés (80 ans), la seconde se singularise encore par les 30 % ayant atteint 5 ans dont la longévite devient remarquable au moins jusqu'à 65 ans. Après cet âge la mortalité s'accroit rapidement, aucun des survivant n'arrivant à 90 ans à une époque où les centenaires commencent à apparaître.

Les paires de jumeaux

On peut enfin s’intéresser au devenir des jumeaux d’une même paire. 126 accouchements gémellaires ont leurs deux nouveaux-« nés » d’âge connu à leur décès.

Parmi eux :

• 12 paires meurent à la naissance, soit pratiquement le dixième de la totalité des accouchements considérés.
• 11 paires regroupent un enfant ayant dépassé 9 ans mais l’autre mort entre 1 et 9 ans révolus,
• 5 paires seulement voient leurs deux enfants dépasser 9 ans. Le plus jeune meurt entre 12 et 57 ans, le plus âgé entre 34 et 67 ans. C’est d’ailleurs une de ces paires qui est constituée des deux plus âgés (des femmes nées en 1850).

Ainsi, sur nos 126 paires de jumeaux, 2 sœurs auront pu fêter ensemble leur 32^eme anniversaire en 1630, 2 autres sœurs leur 38^eme en 1709 et enfin deux dernières ont fêté leur 57^eme anniversaire en 1917... Bien peu de bougies au total !