Fontcouverte
 

Les capitations

La capitation est, en principe, un impôt direct pris sur chaque tête d’habitant indépendamment de sa fortune et de ses revenus. Pratiquement, certaines des capitations qui nous intéressent comportent une taxation sur les métiers et donc les revenus.

Une histoire en cinq actes

Cinq capitations sont connues en Savoie, trois sont liées à des occupations étrangères.

La première correspond aux difficultés de levée de la gabelle du sel instituée en 1561 et commuée en capitation en 1563 et 1564 avant d’être remplacée par une taille. De très faible durée, elle n’a laissé aucune trace à Fontcouverte.

La seconde est la capitation française imposée par Louis XIV pendant son occupation de la Savoie entre 1690 et 1696, suivie d'une troisième lors de la seconde occupation française de 1703 à 1713.

La quatrième est une capitation savoyarde. Instituée en 1702, reprise en 1713 et 1715, c’est en 1734 qu’elle donne lieu à un recensement de la population et, plus indirectement, à la réalisation du cadastre sous la forme de la célèbre mappe sarde. Nous avons pu traiter le recensement de 1734. Par contre, la mappe sarde mérite, à elle seule, une étude que nous n’avons pas entreprise dans la mesure où aucun document la concernant n’a été retrouvé à la cure de Fontcouverte. Ce n’est peut-être que partie remise aux Archives départementales de Savoie !

La cinquième est la capitation espagnole imposée par l’occupant de 1743 à 1749. Elle est précédée d’un recensement. Elle n'a laissé à Fontcouverte que des cottets, inventaires de cotisants, sans grand intérêt et surtout un souvenir détestable de cette période tant l'Espagne a pressuré la Savoie par ses impositions et ses réquisitions.

Les capitations françaises en 1695 et 1696

Les archives de la cure donnent deux listes intitulées « Extrait du rolle de la capitation générale imposée sur tous le habitants de la Province du Dauphiné, Gouvernement de Pignerol, Païs de Savoie & Contez de Nice & de Suze ». Il s’agirait donc en fait de cottets.

La capitation en 1696
La première page de la capitation de 1696

Les photographies du document original de la capitation de 1696 peuvent être visionnées.

Dans sa dernière page le document porte la date du 20 janvier 1696 et est signé à Grenoble par un certain Etienne-Jean Bouchu qui serait Intendant de justice, police et finances dans les susdits pays et des armées de sa majesté en Italie, majesté qui serait alors le roi de France Louis XIV. Nous avons donc affaire à l’une des capitations françaises levées en Savoie à la fin de la première occupation française, suite à une déclaration du roi du 18 janvier 1695.

Le document est malheureusement taché et de lecture seulement partielle.

Les cotisants et les personnes qui vivent avec eux (parents et domestiques) sont rassemblés de façon peu claire ce qui rend difficile la détermination du montant imposé à chaque tête. Il semblerait s’agir en général de 1 livre mais on ne peut déterminer à partir de quel âge la capitation s’imposerait ni à quel intervalle de temps elle s'appliquerait. Des parents avec leurs enfants mariés ne semblent pas toujours taxés à ce taux et le curé semble y échapper. Certaines cotisations sont fractionnaires de la livre (10 sols soit une demi-livre).

Le total de 982 livres est inexploitable pour en tirer une idée du volume de la population. Seul l’ordre de grandeur confirmerait une capitation de 1 livre par tête… en général.

La capitation en 1695

Les photographies du document original de la capitation de 1695 peuvent être visionnées.

Le document est malheureusement amputé de ses dernières pages ce qui prive d’une partie des cotisants, de la signature et de la date du document. Cependant l’entête paraît indiquer qu’il s’agit de la capitation en 1695.

La liste des cotisant est très voisine de celle de 1696 (ce qui confirmerait la date de 1695) avec cependant un détail moindre des cotisants souvent regroupés.

Les constats faits en 1696 peuvent être reconduits en 1695. Les écarts des montants imposés entre les deux capitations ne peuvent être expliqués à la vue des informations données dans les deux documents.

De son côté, l'intendant Etienne-Jean Bouchu qui dispose d'un document complet adresse aux syndics et officier local de Fontcouverte, le 15 mars 1695, ses remarques sur les irrégularités du document qui lui a été remis : inexactitudes, omissions (en particulier celles des membres du clergé, de la noblesse et des domestiques) avec demande de réponse pour le 1er avril. Le clergé et la noblesse sont donc bien soumis à la capitation du roi de France.

Nous avons retrouvé la réponse du syndic de Fontcouverte qui présente quelque intérêt.

La capitation savoyarde vers 1702

Ordre pour la capitation de 1702
Nous ne la connaissons que par les ordres qui en ont été donnés à Fontcouverte fin 1701.

Ce document ne donne aucune information concernant Fontcouverte si ce n'est le montant total affecté à la paroisse soit 2 600 florins (le florin vaudrait 3 sols et 4 deniers, soit approximativement un cinquième de livre). Mais il décrit précisément les conditions imposées aux contribuables.

C'est un édit du roi daté du 8 décembre 1701 qui instaure la capitation dans ses états deçà les Monts. L'ordonnace qui en découle émane de l'Intendant général de Savoie, de Ressen, à Chambéry et porte la date du 21 décembre de l'année. Un cahier accompagné d'un formulaire est joint à la copie de l'ordonance adressée à la paroisse.

Tous les habitants sans aucune exception doivent y être portés sous peine d'emprisonnement des syndics, nobles comme ecclésiastiques et domestiques. Les pauvres sont exemptés sur justification du curé. Il en est de même pour les soldats de sa Magesté mais non leur famille, les eccléiastiques et les nobles à l'exclusion de leurs domestiques. Tous les corps de métiers, soit pour Fontcouverte des notaires aux charpentiers, sont imposés à proportion de leurs revenus. Si le montant global calculé est inférieur au montant imposé, l'écart est réparti en chargeant les plus aisés sans profession. Et si le papier vient à manquer, des papiers libres approchant les papiers officiels suffiront, sa Magesté ne pouvant qu'en être satisfaite ! L'état doit être remis au Trésorier de la province dès janvier 1702 sous peine de menaces.

Enfin est indiqué le tarif applicable aux divers domestiques soit 2 florins pour ceux relativement modestes de Fontcouverte.

Curieusement, la taxe impossable aux personnes autres que les domestiques n'est pas précisée. Le montant total prévu de 2 600 florins ferait penser, vu la population de Fontcouverte, qu'il s'agirait de 2 florins.

La capitation française de 1703 à 1713 
Ordre pour la capitation de 1708

L'occupation de la Savoie par les troupes de Louis XIV de 1703 à 1713 interrompt très rapidement et provisoirement l'application de la capitation savoyarde mais provoque la reprise d'une capitation française.

Nous n'avons pas de trace de cette imposition à Fontcouverte si ce n'est des ordres donnés, le 1er décembre 1707, par le Conseiller du roi de France Nicolas Prosper Baüyn Intendant en Dauphiné et Savoie pour l'année 1708 (on sait par le document que la capitation a été également prélevée en 1707). Il est remarquable que ces directives soient étonnamment voisines de celles de la capitation savoyarde de 1701. Elles reprennent souvent mot pour mot le texte savoyard, imposant la population dans des conditions identiques à la précédente. Il faut cependant noter que :

La capitation espagnole vers 1748

Les photographies du document original de la capitation de 1748 peuvent être visionnées.

Ce document précise qu’il s’agit d’un « roolle de capitation pour les mois de Juillet et suivants 1748 ». Il s’agirait donc de la fameuse capitation espagnole levée pendant l’occupation de 1743 à 1749. Le montant total s’élève à 464 livres, montant équivalent à celui de la capitation française si les « mois suivants » vont jusqu’à la fin de l’année. Cela paraît tout à fait improbable puisque la capitation espagnole est considérée comme exorbitante (136 000 livres par mois pour la Savoie) et en principe s’élève à une moyenne de 1 livre par mois et par personne (enfants de moins de 7 ans, prêtres et « véritablement pauvres » exclus). Ne s’agirait-il pas alors du seul mois de juillet... ou guère plus ?)