Fontcouverte
 

Les bons mois pour se marier à Fontcouverte

Un simple graphique de la fréquence des mariages en fonction des mois de l'année révèle une grande variabilité avec de nombreux mariages entre janvier et août et peu ensuite. Se distinguent cependant mars et décembre d'une part, novembre d'autre part. Cette saisonnalité se trouve pratiquement sans changement important au cours des siècles. Chacune des quatre périodes de temps de notre étude (désignées par le numéro du siècle suivi de l'indice -1 ou -2 quand deux périodes successives de 50 ans peuvent être traitées séparément) sont différenciées.

On doit donc admettre que cette variabilité est significative et qu'il faut l'expliquer. Trois raisons principales peuvent être invoquées.

Les « temps prohibés »

On sait que dans les pays à forte tradition catholique, les périodes du Carême et de l'Avent (périodes de pénitence et de préparation aux deux principales fêtes de Pâques et Noêl de l'année liturgique) sont en principe des temps où l'on ne se marie pas. A Fontcouverte, ce fait est attesté dans les archives de mariage par la mention de dispenses accordées dans les cas de transgresion.

Le Carême

Il commence le Mercredi des Cendres, 40 jours avant Pâques et se termine le Samedi Saint précédant immédiatement le dimanche de Pâques.

La date de Pâques, héritant d'un calendrier tant lunaire que solaire, est largement variable d'une année à l'autre (« Pâques est le dimanche qui suit le quatorzième jour de la Lune qui atteint cet âge au 21 mars ou immédiatement après » ou, plus clairement mais pas tout à fait exactement, Pâques est le premier dimanche qui suit la première pleine lune de printemps).

Le graphique ci-contre donne la probabilité qu'un jour de l'année tombe pendant le carême entre 1587 et 1900.

Seuls les jours compris entre le 16 et le 23 mars sont toujours en carême ; de part et d'autre de ces dates, la probabilité d'un jour d'être concerné décroit régulièrement pour s'annuler au 9 février et au 27 avril. Si l'interdiction de mariage en carême est respectée, on doit s'attendre à un grand déficit de mariages en mars et un moindre déficit en février et avril.

C'est bien ce que l'on observe effectivement en mars. Mais en février et avril on constate au contraire un excès. Sans doute, les mariages qui auraient dû avoir lieu en carême sont-ils reportés dans les nombreux jours hors carême de février ou d'avril.

Dans les archives de la cure, on trouve 17 dispenses pour temps prohibé de carême entre 1656 et 1862 (avant 1656 les dispenses ne sont que rarement précisées). Parmi celles-ci, 4 sont relatives à des mariages dont 3 célébrés le seul 14 mars 1813 (année particulièrement riche en mariages - 21 - ; nous n'avons jamais constaté par ailleurs 3 mariages le même jour). Ils correspondent manifestement aux circonstances militaires de l'époque. Nous n'en tenons pas compte.

Il s'agit donc d'une proportion faible des mariages qui auraient eu lieu si l'interdiction n'existait pas (approximativement 6 %).

A l'époque des mariages à la mairie, entre 1862 et 1900, un seul mariage tombe en carême (soit environ 3 %). Par contre 7 mariages s'y trouvent entre 1900 et 1938 (soit très approximativement 18 % des mariages possibles en période de carême) ce qui montre une nette tendance à la sécularisation à partir du XXe siècle.

L'Avent

Il se termine la nuit de Noël et débute 4 dimanches avant (3 seulement si Noël tombe un dimanche) soit une durée moyenne de 25 jours.

Le calcul des dates de début d'avent donne la probabilité qu'a un jours quelconque de l'année de tomber pendant cette période entre 1587 et 1900 comme l'indique le graphique ci-contre.

Du 26 novembre au 2 décembre la probabilité d'un jour quelconque de tomber dans l'avent croit régulièrement. Les jours du 3 au 24 décembre sont toujours dans l'Avent. On doit donc s'attendre à très peu de mariages en décembre et à un léger déficit en novembre. On confirme de nouveau ce fait dans le graphique de la répartition mensuelle des mariages pour décembre alors que les mariages « interdits » semblent reportés en novembre et peut-être en janvier.

Dans les archives de la cure 9 mariages entre 1656 et 1861 tombent dans l'avent soit, là encore, une assez faible proportion des mariages qui auraient eu lieu sans interdiction (soit 8 %).

Dans les archives de la mairie, 3 mariages sont conclus dans cette période entre 1862 et 1900 (soit 14 %), 8 l'étant entre 1901 et 1934 (soit 38 %). L'observance de la règle de l'avent serait moins rigoureuse que celle du carême. La tendance à la sécularisation lors du premier tiers du XXe siècle est, là aussi, nettement confirmée.

Globalement, les anomalies constatés en mars et décembre dans la répartition mensuelle des mariages semble donc entièrement justifiée par les contraintes religieuses et on peut remarquer que ce fait reste vrai jusque à la fin du XIXe siècle.

Le cycle des travaux agricoles

Une fois réglé le problème des jours prohibés de carême et de l'avent et le report des mariages sur les mois adjacents, on constate dans la répartition mensuelle des mariages une période de janvier à juillet où les mariages sont nombreux suivie d'une période d'août à octobre (et peut-être novembre et décembre) où les mariages sont nettement plus rares (moins de moitié).

A Fontcouverte, on est pousser à admettre que l'hiver puis, particulièrement, le printemps et le début d'été laissent toute latitude, en tout cas assez, à l'organisation et la célébration des mariages, la période de fin de printemps restant la plus favorable, sans doute pour des raisons climatiques : les travaux dans les champs ne seraient pas trop pressants à cette période de l'année. Par contre, la suite de l'été et l'automne qui correspondent à la période des récoltes et à l' « enmontagnage » du bétail dans les alpages seraient particulièrement défavorables aux festivités matrimoniales.

Cette contrainte agro-pastorale ne semble pas avoir évoluée de la fin du XVIe siècle jusqu'à celle du XIXe.